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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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14 août 2013

Radiation 10 - Bossa Super Nova

Une fois n'est pas coutume, commençons avec enthousiasme par la conclusion. Bossa Super Nova, le nouvel album de Radiation 10 est un disque abouti et indispensable, dans lequel on aime à se perdre et à trouver à chaque écoute de nouvelles pistes, qu'elles soient fausses ou vraies, qu'elles soient cachées ou bien visibles, qu'elles soient communes ou le fruit d'un soliste.
L'orchestre du Collectif Coax, dont nous avions déjà pu dire le plus grand bien avec leur précédent album, revient avec un disque vierge de toute indication, sorti sur le label du collectif, qu'il convient de prendre de manière brut, sans temps faibles ni césures.
Une pièce unique en 10 mouvements solides mais nullement monolithes, qui travaillent les timbres comme d'autres travaillent la roche, avec le geste leste et précis de ceux qui aiment les masses soyeuses et les plis voluptueux de la pierre.
A force d'écoute, fasciné d'abord par la rigueur mâtinée de fluidité qui prend forme, on se rend compte du travail de chacun. De la multiplication de ces prises de paroles individuelles qui forme un discours résolument collectif. D'ailleurs, si le nonet s'est rangé sous l'égide du 10, c'est que comme on le dit dans les discours formatés des compte-rendus sportifs. Le dixième homme c'est l'équipe.
Et pourtant, que d'individualités dont nous parlons sans cesse en ces pages ou ailleurs !
Hugues Mayot aux anches était du Sens de la Marche de Ducret. Je le dis souvent, mais on ne mesure pas encore l'influence originelle dans bon nombre de nouvelles formations ; Fidel Fourneyron qui s'impose, ici comme dans le Surnatural Orchestra, comme l'un des spécialiste du trombone dans les grandes formations et dont l'aisance surprend autant que dans le récent Tower vol. 3 (Ducret, encore...) ; Emmanuel Scarpa dont la rythmique impeccable s'apprécie également dans le Sylvaine Hélary trio ; Julien Desprez à la guitare qui est décidément dans tous les bons coups et qui joue ici son rôle favori. il consiste à éroder la masse orchestrale par des profondeurs souterraines et fébriles dans l'électricité des claviers de Bruno Ruder, autre figure de cet orchestre... Ce dernier, collaborateur régulier de Magma est aussi membre du délicieux Yes Is A Pleasant Country.
La liste pourrait être longue, de cette Dream Team qui pose sur la pochette du disque avec les lunettes de ceux qui vont assister à une explosion thermo-nucléaire, déjà sur-exposés par une lumière crue....
L'explosion n'est que sonore, mais elle n'en est pas moins physique, tangible.
Elle prend racine dans le premier mouvement et se développe dans une entropie constante. On retrouve comme dans le premier album des atomes de rock et de musique contemporaines, des bosons de motifs répétitifs et des photons bruitistes qui s'incrémentent et s'entrechoquent dans un joyeux foutoir. Il s'ordonne au fil du temps, jusqu'à devenir absolument stable dans un cinquième mouvement central, résolument jubilatoire dans sa construction et dans sa capacité à entrer dans une continuelle mutation.
Ce mouvement central, c'est le point d'impact, protégé du souffle de l'explosion. Il expose la force de frappe de l'orchestre et sa capacité à jouer dru.
La base formée de Scarpa et le contrebassiste Joachim Florent, auquel se superpose le vibraphoniste Benjamin Flament, véritable liant de l'ensemble ainsi que l'accélérateur de particule Bruno Ruder, permettent à chacun de disposer d'un grand espace de liberté dans la masse.
Écoutons à ce titre le 3ème mouvement où le remarquable trompettiste Aymeric Avice s'échappe de la masse éléctrique de Ruder, vite suivi par Fourneyron dans une volute de liberté. Super Bossa Nova a la face brillante de l'étoile qui explose en des milliers de petites comètes et le chaos ordonné des objets en orbite.
C'est la profusion de timbres qui offre ce côté à la fois mutant et d'apparence inoxydable qui fait la force de Radiation 10. On croit parfois entendre des poussières de Jazz-Rock, notamment lorsque le violon de Clément Janinet s'empare du quatrième mouvement en compagnie de Desprez, mais les reflets métalliques y donnent à voir d'autres musiques, où se mélange une grammaire électronique fondu dans une électricité brûlante.
Ce qui pourrait passer comme un grand zapping offre au contraire, a l'instar du travail d'Olivier Benoit avec le Circum Grand Orchestra, un discours nouveau, une sorte d'esperanto moderne pour citoyens-musiciens sans frontières, parfaitement réjouissant.
Ces musiciens, ce courant, réinventent une écriture pour grand orchestre sans pré-requis autre que le frottement du rythme et du timbre. Comme avec le CGO, où avec les orchestres de Sylvain Rifflet, ce qui ne pourrait être qu'un bric à brac foutraque devient une machinerie extravagante et implacable qui se renouvelle sans cesse.
Stratosphérique.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

49-Arktikum

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