Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
Derniers commentaires
Newsletter
30 abonnés
Archives
9 octobre 2013

Ping Machine - Encore

Dans la sinistrose actuelle, il y a quelque chose de tout à fait rassurant, au delà de la richesse des productions actuelles. C'est de constater que l'Hexagone dispose de nombreuses formations qui osent le Grand Format.
Du Surnatural Orchestra (qui signe un disque phénoménal cette année) au Circum Grand Orchestra en passant par le premier d'entre eux l'ONJ, ces formations sont pléthores et sont d'une incroyable richesse. Parmi celles-ci, Ping Machine attire un public large, aussi large que l'orchestre lui-même et ses quinze pupitres.
Dirigé par le guitariste Fred Maurin, reconnu à juste titre pour son talent d'écriture et la finesse de ses arrangements, l'orchestre est célébré de toutes part. Nous ne l'avions jamais évoqué en ces pages et c'est sans doute une erreur ; à peine concéderai-je que je ne partageais que moyennement l'enthousiasme de mes camarades sur le dernier album. Il y manquait, à mon goût, peut être de l'audace. Une mise en danger.
Encore, le dernier album de la formation, vient combler ce manque. Et de quelle façon ! Enregistré live dans la belle salle tourangelle du Petit Faucheux, les suites composées par Maurin et jouées presque sans filet ont l'odeur du souffre et le goût de la flamme. L'orchestre est une machinerie parfaitement huilée, qui joue en donnant l'impression d'habiter ce répertoire qu'ils n'ont pourtant qu'à peine répété. Ca tourne sans ronronner avec une fluidité remarquable.
A l'écoute des quatre mouvement de "Encore", la première suite qui impressionne par sa densité et par cette incroyable spatialisation qui donne un souffle inoui à l'orchestre, on comprend ce qui fait le grand succès de ce Ping Machine. Sans ostentation, avec une légèreté d'équilibriste, Maurin perpétue cette équilibre entre Europe et Amérique qui fut la marque notamment des ONJ du début des années 90, comme notamment celui de Denis Badault, où l'on retrouvait déjà le tubiste Didier Havet, mais avec un langage neuf, renouvelé et diablement contemporain. Il y a du Rüegg, l'âme du Vienna Art Orchestra, chez Maurin. Il joue peu et, comme l'autrichien, dirige beaucoup en ayant une idée précise du dosage.
Voir à ce titre l'incroyable troisième partie de "Encore" ou la base rythmique Raphael Schwab à la basse et Rafael Koerner à la batterie affronte le vibraphone de l'excellent Stephan Caracci et une masse de soufflant dont la finesse du relief donne effectivement envie de crier "Encore" !
Mais après "Grrr..." un Intermède qui permet avant tout de mettre en valeur Guillaume Christophel au sax baryton ainsi que le potentiel de rugosité d'une masse orchestrale polymorphe, c'est sans doute "Trona", et son abstraction presque minimaliste qui constitue le morceau de choix de cette démonstration de force.
A l'heure où il est de bon ton -et de fort mauvais goût- d'opposer ce qui est du jazz à ce qui en est pas, cette suite aux motifs répétitifs, qui commence par un bourdonnement perclu d'électricité est la meilleure des réponses. On y découvre un Fred Maurin à la guitare lourde, grasseyante, qui mène un orchestre toujours aussi réactif. Les idées développées dans ce morceaux laisse éclater un sens de la scénarisation rare, La profusion de directions et de pistes permet une dimension narrative et contemplative intimement mêlées. La pâte orchestrale de ce morceau est granulé par la porosité et témoigne d'un travail des timbres au tropisme très contemporain malgré une grammaire plus que jamais inscrite dans le jazz.  Par instant, on songe à ce que l'on a pu entendre récemment chez Radiation 10 ("Trona 12PM").
Comme on se retrouve... Et qui pourra s'en étonner quand on regarde le line-up de cet orchestre : Didier Havet au tuba est le recordman du monde de l'ONJ avec quatre participations, Bastien Ballaz, le tromboniste, fait le bonheur du Kami 5tet. Stephan Caracci fait partie de Rétroviseur chez Coax. Debellefontaine, Soro et Koerner sont trois quart de Big Four... Quand à l'ami trompettiste Quentin Ghomari (photo), il est membre de Papanosh et des Vibrants Défricheurs.
On assiste à une convergence incroyable, mais nullement incongrue entre des musiciens qui explorent un propos aux limites inconnues. Réjouissons nous.
Et réjouissons nous Encore d'avoir trouvé avec ce nouvel album de Ping Machine un bien fameux chaînon manquant.

15-grobal-15

Commentaires
D
Belle chronique, l'ami. Bravo.<br /> <br /> Guy
Répondre