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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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1 novembre 2018

Daniel Studer et Mark Eichenberger - Suspended

Lorsque Daniel Studer et Mark Eichenberger se rencontrent en face à face, c'est par ramification toute la scène improvisée suisse qui se rejoint.
Le premier est contrebassiste, on l'a beaucoup entendu avec son vieux compagnon Peter K. Frey. Le second est un clarinettiste plus proche de la musique contemporaine, habitué des duos, mais qui s'est également illustré dans l'enregistrement multiple ; sur l'étonnant Tuttrieb-Triebtat, il joue de toutes les clarinettes possible, en orchestre solitaire grâce au re-recording. C'est également avec cette technique qu'on l'a entendu aux côtés des Mytha Horns d'Hans Kennel, un orchestre de cor des Alpes.
Rien de tout cela ici. Du naturel et du son brut : souffles, crissement, progressive altération du silence, progression lente, comme une reptation où l'archet amplifie les harmoniques de la clarinette basse sur « Walking Harshly ».
Enregistré dans les studios de la radio SRF, la relation entre les deux improvisateurs prend le temps de s'installer. Sur « Staying Numbly », la contrebasse accueille le sifflement des anches de la clarinette par des attaques sporadiques, qui font claquer le bois sans rompre l'univers microscopique mis en place par Eichenberger, impressionnant de retenue.
On pense à ce que Studer avait enregistré avec Alfred Zimmerlin, une musique qui n'a pas besoin d'être rugueuse pour être accrocheuse et se contente même d'une esthétique spartiate où chaque mouvement est un micro-évènement dans un temps long et pesant.
Parfois pourtant, les tensions cèdent dans ce Suspended tout naturellement publié par HatHut.
Suspendu par le temps, suspendu aux lèvres qui soufflent, suspendu à l'instant à venir qui parfois n'arrive jamais ajoutant à la nervosité... Lorsqu'il y a trop plein, c'est une vague qui déborde, à l'instar de « Gliding Upwards » qui s'épanche davantage.
Mais ce n'est pas le chaos ou le torrent, plutôt un liquide épais et toxique qui se répand et englue tout sur son passage. Si ce disque est intense, c'est pour ce qu'il suggère et ce qu'il transmet à l'auditeur : un délicieux engourdissement où tous les sens sont en éveil.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

88-Fourchette

 

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