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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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24 juin 2012

Elise Caron & Edward Perraud - Bitter Sweets

Il n'y a pas besoin d'expliquer pourquoi on aime Elise Caron. Il suffit de l'écouter tranquillement sur la platine de son salon ou de la voir sur scène pour le comprendre. Chaque aventure de la chanteuse est différent et pourtant garde, comme un fil ténu, une cohérence. La voix est troublante, puissante, heurtée ou caressante... Peu importe, on pénètre dans l'univers qu'elle a créée en toute confiance, certain d'y trouver à la fois de l'émotion, une pointe d'ironie, beaucoup de talent et des musiciens de talent alentour.
C'est ainsi.
On aime Elise Caron.
Quand un duo avec le percussionniste Edward Perraud a été annoncé, nous étions beaucoup à saliver, tant la rencontre entre les deux mondes promettait. De son solo Préhistoire(s) sorti en 2009 sur son label Quark à son récent Synaesthetic Trip en quartet dont nous parlerons dans les prochaines semaines, Perraud s'est imposé comme un maître coloriste, un peintre sur peau, bois et métal capable de donner vie en peu de gestes à des atmosphères profondes, interstitielles, comme teinté dans la masse du silence. La rencontre entre ces deux là s'envisage avec gourmandise.
Bitter Sweets est une boîte de bonbons où l'on ne se lasse jamais de piocher. Les morceaux sont courts, comme le disque lui même, mais chacun des titres est un petit monde en modèle réduit, une miniature pleine de trompe-l'oeil et de mouvement gonflés d'électronique. Elise Caron se joue avec une jubilation apparente de ces changements incessants, elle use de son humour en imitant à merveille les radios commerciales flamandes ("brütes") ou visite les tessitures ("Amsterdam lied"). De la lascivité pleine d'acide de "Give me your tong" aux grommellements électriques de "Le Gras et le mouillé", les deux improvisateurs se cherchent en sachant déjà pertinemment qu'ils vont se trouver.
Cette musique est complexe, elle part dans tous les sens... Cependant, elle reste cohérente et semble, dès la première écoute, terriblement simple et irréfragable.
De loin en loin, on retrouve Elise Caron à la flûte dans un "Le beau moqueur" qui rentre dans la tête comme un ver d'oreille maléfique ou dans un détournement de musique contemporaine ("Ni Boulez ni marteau"). Perraud quand à lui trouve sans cesse de nouvelles idées ou de de nouvelles ponctuations. C'est parfois dérisoire et plein d'humour ("Le rappeur Khalité prie", juste formidable) sans pour autant tourner au disque de farces et attrapes. Parfois aussi, on songe au duo qu'Elise Caron partage avec Lucas Gillet dans des petites bulles de pop ("Rêves Partis" et cette pointe de basse sèche comme un caillou). Tout fonctionne en tout cas parfaitement avec ce Bitter Sweets plein de clins d'oeil et d'humour.
Que fait-on de ce genre de douceurs un peu piquantes ? Comme lorsqu'une boîte de bonbons trône trop longtemps sur le bord de la table, on butine et on y revient, on insiste et on picore.

Sans risque aucun d'indigestion.

01-Elise-Caron

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