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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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14 mai 2013

Kamilya Jubran & Sarah Murcia - Nhaoul'

Il y a quelques jours, nous évoquions en ces pages le trio de Sylvain Cathala, et la joie d'y retrouver la contrebassiste Sarah Murcia. Parallèlement à ce trio, la contrebassiste sort un disque avec la chanteuse et joueuse de Oud palestinienne Kamilya Jubran, qui mérite qu'on s'y arrête pour bien des raisons.
D'abord parce que c'est l'occasion d'entendre une nouvelle facette de l'aventureuse chanteuse dont le disque en duo avec le trompettiste et électronicien Werner Hassler. Wanabni était la preuve d'un esprit curieux et syncrétique, ainsi que des infinis possibilités des métissages au travers des timbres, même quand il s'agit de mêler la musique traditionnelle arabe et bédouine avec des sonorités plus urbaines.
Comme pour le duo avec Hassler, Jubran va, dans cet échange avec Murcia, chercher des poésies en prose dans le patrimoine arabe et bédouin. Sans comprendre les paroles, ce qui est mon cas, on se laisse porter par une sonorité, une rythmique qui dépasse le sens pour donner une profondeur au propos.
L'autre bonne raison de s'intéresser à ce disque est qu'il permet de retrouver la sonorité si claire de la contrebasse de Murcia lorsqu'elle se confronte au oud. Laissez vous porter par ce concert offert par Arte Live Web ; c'est un vrai bonheur de pureté et d'intelligence.
Le disque s'appelle Nhaoul', ce qui signifie en arabe "métier à tisser". C'est vrai qu'il y a de ça avec le mélange conscient de ces cordes entrecroisées, cette fusion, loin des sens galvaudés qu'on a bien voulu donner à ce mot. A l'écoute de "Hayati (ma vie)", et ce cycle entêtant où contrebasse et oud se répondent et se jouent de leurs timbres, on comprend très vite l'effort de compréhension et d'apprentissage qu'il a fallu aux deux musiciennes pour arriver à une telle cohésion qui prend des allures de connivence. On pourrait facilement comparer ce duo avec Interzone, mais la démarche est différente. Bien sur, il y a le oud et une approche traditionnelle très présente, mais Interzone est très terrien, visite les entrailles, s'enferre au coeur de l'entre-deux lorsque ce duo est plus aérien, plus ample et cherche a enjamber les mondes plus qu'à les entrechoquer.
Bien sur, les deux femmes se connaissent pour avoir enregistré ensemble Ala Fein en 2002 au sein du groupe palestinien Jabreen. Bien sur, Sarah Murcia en nomade musicale qui se plait dans toutes les musiques, avait cette appétence à pénétrer au coeur des quarts de ton. Bien sur, la culture musicale de Kamilya Jubran dépasse largement les frontières de sa musique, et l'on perçoit, dans un morceau comme "Laïtani" une fascination mutuelle, et un terrain d'entente au contours très larges, soutenu par un trio alto/violon/violoncelle (remarquable Christine Krauz !) qui donne des allures de quintet de cordes étrange et précieux qui a fait de son chambrisme un monde.
Si les deux premiers morceaux de l'album sont de vrais échanges en duo, le reste de l'album s'étoffe d'une musique plus savante, moins tripale avec les autres musiciennes.
Enfin, ce disque est indispensable pour cette "Suite Nomade" en trois parties qui célèbre le talent d'arrangeuse de Sarah. On en oublie parfois, notamment dans la partie centrale qui offre des moments aériens qui du oud ou de la contrebasse accompagne le chant. Le jeu très mélodique et lumineux de Murcia est étonnant et plein de poésie.
Comme toujours, pourrait-on dire ; mais il y a des évidences qu'il est bon de marteler.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

09-Garance

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