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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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19 octobre 2022

TOC - Did it Again

Pendant le confinement, ou plutôt à peine après, ça a été un soulagement. En tout cas une libération ; on n'a pas assez parlé de ce que la musique nous a fait pendant le COVID, et ce que le COVID a fait à la musique ; enfin voilà, durant l'été 2020, Closed For Safety Reasons a été une bande-son nécessaire : entendre l'un des groupes les plus importants de la scène musicale expérimentale française, TOC, frayer avec Dave Rempis, l'un des saxophonistes étasunien les plus brillants, c'était jubilatoire.
Du reste, depuis quinze ans, il n'y a guère de moment où la musique de Jeremie Ternoy, Peter Orins et Ivann Cruz n'a pas été importante, chamboulante. Et même si on ne danse pas, le travail sur la masse, sur les motifs répétitifs et les soudaines brisures électriques chamboule toujours autant ; et si l'on est pas ivre de la danse, on est souvent groggy par le mouvement créé par les trois membres du label Circum.
Alors quand Did it Again est arrivé sur la platine, on ne s'est pas dit Oops, plutôt concaincu que goûter l'expérience en live de Orins et ses camarades valaient bien le détour. Pour ses quinze ans d'existence, TOC nous offre quatre concert de près de trois-quart d'heures. Plus roboratif, c'est difficile.
Et c'est une expérience intense, presque autant que le travail de sape d'Ivann Cruz sur le plus calme "Base", enregistré chez eux à Lille, à la Malterie, pendant que Peter Orins travail la matière davantage que la pulsation et que l'on perçoit les claviers de Ternoy capables de jaillir à tout instant, quitte à jouer d'abord des nappes lancinantes. Toute la science de TOC est ici, dans quelques motifs lancinants qui percent pour mieux frapper, dans cette capacité à interroger d'abord l'abstrait, de rendre tout partiellement flou pour mieux insuffler ensuite tout une énergie rock, une électricité contondante et pesante qui peut prendre toutes les formes.
Même les plus ectoplasmiques, comme cette guitare qui perdure, se cogne dans les échos, semble hanter le néant.
J'aimerai bien être Petr Slaby, le tchèque, qui écrit les notes de pochettes de ce quadruple album et découvrir TOC non pas au premier album, mais avec beaucoup de documentation ; se prendre de front cette mécanique un peu vicieuse qui avance comme l'huile chaude se répand, quelle que soit la forme, quel que soit l'instant. Dans Did it Again, il y a quatre unités de lieu pour une unité de temps à peu près constante, une longue plage à développer de 45 minutes. Et si le spectre se ressemble, le contenu est divers, et la transe lente et puissante peu prendre bien des formes.
Did it Again est une pièce de théâtre. Un drame en quatre actes ; deux en Europe Centrale, deux à la maison. Et un point d'orgue, au "Lumen" de Budapest, deuxième acte en forme de Climax, avec un Ivann Cruz intenable. La prise de risque y est maximale, davantage sans doute que les épisodes Lillois, clairement moins tendus même si les éclats fièvreux de "Base" résonnent encore puissament quelques minutes après la fin.
Les lillois de TOC font de Did it Again un feu d'artifice d'un rare éclat, et surtout prouvent que la musique improvisée peut remettre l'ouvrage sur le métier autant de fois que nécessaire. Il en résultera toujours un éclat différent.
Un indispensable.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

04-Treille copie

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