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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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28 août 2013

Alban Darche - L'Orphicube

Il y a des années qui sont celles d'un musicien.
On parle alors de temps de maturité. Quand la maturité est déjà là, ce qui est foncièrement le cas d'Alban Darche, on dira que c'est celui de la maturation. Maturation des idées, des projets, de plusieurs lièvres courus en même temps et qui, aisément rattrapés, se retrouvent exposés en peu de temps.
On avait salué à juste titre, en 2009 et 2010 la sortie de son album en trio et d'un Budapest Concert absolument réjouissant.
Depuis, apparemment plus rien...
Occupé à dresser de nouvelles faces à son Cube, le saxophoniste nantais est revenu presque discrètement en début d'année avec un Frelon Rouge qui nous a piqué sans attendre ; ce n'était que le début de la déferlante cubesque, avec avant l'été un Queen Bishop gargantuesque... Et cet Orphicube qui est sans doute une forme de synthèse colorée d'années de recherche et de formules.
Ce n'est pas seulement de synthèse de la musique de Darche, d'ailleurs... Quand bien même on retrouve dès "4 brothers" son écriture fluide et cette souplesse dans la direction d'un orchestre ; c'est une synthèse de plusieurs années d'évolution d'un certain jazz hexagonal exposé dans un orphéon cubesque. On y retrouve plusieurs figures des heureuses mutations en cours depuis une décennie. Sylvain Rifflet bien sur, comme une évidence, mais aussi Boisseau, Donarier et Lavergne, les fidèles.
Pour cet orphicube, Alban Darche créé même un nouveau label une nouvelle aventure, Pépin&Plume.
Un projet à part, on vous dit.
Au fil des morceaux, on déniche quelques gramme de musique populaire, des fragrances d'Europe Centrale et de folklores imaginaires, le tout assaisonné dans une appétissante macédoine. Dans le magnifique "TBBM", la ritournelle semble siffloter un air de Bach mutant arrangé pour un bal de dimanche. Ce qui pourrait être anodin prend alors une autre forme, plus sophistiquée. Celle que l'on trouve dans les bals -ceux de Laurent Dehors, des Vibrants Défricheurs, etc.-, et que Darche s'approprie avec sa propre grammaire.
Pour cet Orphicube, Darche a voulu évoquer Robert Delaunay, ce peintre qui travaillait la couleur subjective qui persiste sous les paupières après avoir fixé une lumière crue. Cette sensation de persistance rétinienne est appliquée à la musique populaire. Darche la travaille au coeur avec cet Orphéon chimérique, forme populaire s'il en est.
Ces ritournelles qui font le patrimoine commun, qu'on connait sans connaitre, qu'on chantonne, qu'on oublie, qu'on transforme, qu'on marmonne, qu'on altère sont finalement le tronc commun indivisible et inconscient de tout improvisateur. Voilà le propos. Rappelons d'ailleurs que sur le magnifique Beaux Arts, Sylvain Rifflet avait lui aussi évoqué Delaunay dès le premier morceau.
Comme on se retrouve.
C'est en écoutant "La Martipontine" qu'on comprend que l'orphicube plonge directement dans les racines du musicien. Parce que c'est le titre de son second album avec le Cube, bien sur, mais surtout parce que cette ouverture au piano par Nathalie Darche, cette mélodie d'apparence simple et tranquille s'enfle et devient râpeuse au fur et à mesure que les instruments s'agglomèrent, le ténor de Sylvain Rifflet s'engage dans une joute toute amicale avec l'étonnant accordéon du précieux Didier Ithursarry. Un orage qui repartira sur une nouvelle légèreté, un incroyable foisonnement dont la simplicité nous emporte.
Il y a dans chacun des morceaux de l'Orphicube une scénarisation, une progression très précise qui, si elle est depuis longtemps la marque de fabrique d'Alban Darche, trouve ici une forme de plénitude. Voir ainsi "Les Parapluies", Où Ithursarry s'illustre encore.  L'histoire et une atmosphère avec une impressionnante fluidité.
On connait, auprès de Machado notamment, la capacité qu'à l'accordéoniste de donner du volume à des formations élargies. Il est ici indispensable, et avec le violon de Marie-Violaine Cadoret, absolument central. On se souvient du Stringed et du Trumpet Kingdom, avec l'Orphicube, Darche se lance un défi supplémentaire dans l'amalgame des timbres. Mais ce n'est pas dans le registre de la contrainte, mais dans celui de la sobriété lumineuse. Il ne cherche pas à écrire pour tel ou tel instrument en particulier, mais de donner toutes les couleurs du monde à un orchestre dont le line-up peut changer, évoluer, mais qui gardera une forme d'universalité. L'orphicube est comme une eau pure qui passe sur de la roche, elle se sédimente sans s'alourdir. Elle prend une part d'identité sans changer de nature...
Et signe d'ors et déjà une des plus belle réussite de l'année 2013.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

135-Errance-Pyha

Commentaires
F
oh ben non Catherine ! Faut pas ! J'ai hâte de le lire moi !
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C
ben voilà. je pensais écrire deux mots de mon enthousiasme monomaniaque pour cet album, et tout est dit. je retourne l'écouter :-)
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