Clusone 3 - Soft Lights and sweet music
Ce qui est formidable avec le label Hat-Hut, c'est qu'il permet, par sa politique de réassortiment des disques plus anciens, de découvrir des petits trésors enfouis qui sorte tout frais comme s'ils étaient du jour ; il est de musique une notion spéciale de la péremption... Car du très bon semblera toujours frais quand du très mauvais périra dans la minute.
Clusone trio est de la première catégorie, aussi peu importe que cette musique fut enregistré il y a 15 ans pour une radio suisse alémanique. A la pointe d'un jazz européen en liberté, le trio originaire d'Amsterdam et portant le nom d'une petite ville proche de Bergame avait certainement cette idée de non-péremption dans la tête en s'attaquant au patrimoine musical d'Irving Berlin par la face Nord, sans filet, triturant la matière sans volonté de la dénaturer mais pour lui donner plus de relief. Irving Berlin n'est pas Glenn Miller, et si l'humour a sa grande place, la dérision est inopérante ; il s'agit donc bien d'un hommage. La doublette rythmique Reijseger au violoncelle et Bennink à la batterie laisse la troisième pointe du triangle, le multianchiste Michael Moore en parfaite liberté pour créer de nouveaux chemins dans la musique de Berlin.
Sans même y réfléchir, on connait tous Irving Berlin pour ses succès de Broadway et ses standards larmoyants grommelés par le rat pack ou joué avec force violons. Cheek to Cheek, White Christmas, When I lost you et j'en passe... A priori très éloigné d'un jazz moderne et sans concession...
Sauf que les mélodies de Berlin sont pour la plupart d'une efficacité imparable, et que la simplicité du jeu du trio donne à ces interprétations un apprêt remarquable. Dénué de ses atours clinquants, c'est le coeur de la musique qui apparaît dans sa structure la plus cabossée.
Pour un très grand plaisir.
Et une photo qui n'a strictement rien à voir.