De Chassy/Yvinec - Songs from the last century
Au jeu de la valse des étiquettes, du sillon creusé dans son propre terrain en faisant fi des contingences de genre où l'on veut bien vous ranger, Daniel Yvinec, nouveau patron de l'ONJ est passé maître. Et comme ce n'est pas une posture, il est l'un des musiciens français les plus intéressant du moment, signé chez Bee Jazz, un label qu'on aime beaucoup par ici.
Ce disque est le dernier d'un triptyque, que le contrebassiste a enregistré avec son complice de toujours, le très élégant Guillaume de Chassy, pianiste soyeux dont le style en retenue s'est toujours bien accordé avec le jeu capiteux d'Yvinec, avare de note et de mouvement, mais toujours dans le bon trait. Songs from the last century, comme ses comparses "Chansons sous les bombes" et "Wonderful World", a pour décor la chanson : française et populaire dans le premier avec Dédé Minvielle, New-yorkaise, nocturne et pluvieuse dans le second avec Andy Bey et David Linx... Tout est là pour rendre hommage à des bluettes qui restent comme des petites lucioles dans l'histoire de la musique, mais sans jamais vouloir faire dans le décalé ni l'adaptation poussive. C'est de l'interprétation jazz de morceaux biens écrits et sensibles, de Prince à Paul Misraki en passant par Mac Cartney.
Mais si les deux premiers étaient presque des carnets de voyages musicaux (Wonderful World est un taxi qui roule à faible allure à Manatthan), ce dernier album est plus charpenté et clôture un travail mené par les deux musiciens, et qu'ils avaient chacun continué de leur côté avec "Lost Crooners" et surtout "Faraway so Close" dont la formule en trio semble avoir inspiré "Songs of...". D'autant que les invités, Paul Motian à la batterie et Marc Murphy, vocaliste de rocaille qui vous retournerait un fan prépubère de slipknot, apportent une patine luxueuse au propos des compères. Motian régule les morceaux et permet à Yvinec de se laisser aller à l'émotion. Murphy est absolument magique. C'est du jazz vocal un peu compassé ? Peu importe : c'est tellement suave, sans pour autant être sucré que c'est simplement une évidence qui s'affranchit des styles, des modes et des étiquettes.
On y revient...
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...