Umlaut - Looking Glass
Nous en parlions l'autre jour à l'occasion de la chronique de l'album de Ducret, mais c'est très intéressant de voir, dans les jeunes musiciens du moment l'influence que le guitariste peut avoir, tant au niveau de la composition que dans la recherche d'une musique en mouvement, portés par des "trios à saturation", terme peut être plus exact et plus parlant que le "power trio", qui renvoie beaucoup trop aux "Disraeli gears", crèmes inflammables de Jack Bruce... La preuve en est dans les trios récemment évoqués ici comme DDJ ou Syntax Error.
Umlaut, le trio dont le batteur et leader, Emmanuel Scarpa est la pièce centrale (à bien des titres, nous le verrons ensuite) est dans cette mouvance, même si l'absence de de basse à corde est notable ; il évoque directement le travail de François Corneloup avec Ducret dans ULM, où les riffs assassins et distordus de Ducret donnaient une rythmique distordue et frénétique poussant le batteur dans ses retranchements. Le nom du groupe, "Umlaut", deux points qui évoquent tant une distorsion du son que de la réalité sont tout le propos de l'album.
De part et d'autre du batteur, le guitariste Fred Poncet et le claviériste Fred Escoffier entremêlent des sonorités métalliques, grinçantes et acides qui portent le groupe à l'échauffement sur des compositions particulièrement érudites de Scarpa. A ce titre, "Rollmops-Cacao" est un modèle du genre dans cette volonté de briser les codes et les sonorités, d'alterner riffs dévastateurs et nappes contemplatives, décomposition harmonique et rythmique cabossée.
La volonté de Scarpa dans Looking Glass est d'évoquer le miroir, sa part de symétrie et d'étrange, son potentiel onirique et sa crue réalité. C'est la rythmique, centrale, qui fait office de passeur pour les fièvres électriques qui s'y succèdent, s'y mélangent et s'y confondent. Escoffier et Poncet s'intervertissent et se travestissent dans les effets électriques...
Mais c'est sur la pièce centrale -encore- en deux parties "through the looking glass" que le propos est d'autant plus efficace que le duo autour de la batterie se double de deux alter-egos, Ducret himself aux guitares et Antonin Rayon (qui côtoie Scarpa dans l'inestimable Sylvaine Hélary trio) aux claviers, qui ajoute plus encore d'ambivalence et d'étrange à un projet très abouti et surtout très réussi.
Et une photo qui strictement rien à voir...