Le Grolektif - Bigre !
S'il convenait d'expliquer que la création musicale dans le milieu du jazz se porte bien et ne se résume pas qu'à quelques lieux de culte, il conviendrait de dresser une cartographie des jeunes collectifs de musiciens désireux de porter cette musique en France.
Pas sur qu'au final, ce résultat ne convienne aux nauséabonds questionnements sur l'identité nationale. Ce n'est que plus réjouissant.
Le Grolektif de Lyon est un groupe de musicien portant de multiples projets et comptant en ses rangs de magnifiques musiciens, parmi lesquels Romain Dugelay, que l'on a pu croiser avec le "Diagonal" de Jean-Christophe Cholet ou Yoann Durant, saxophoniste de la Compagnie Lubat et comparse de Raphael Quenehen. Comme on se retrouve...
Cela fait des années que ceux qui s'intéressent à ce qui bouge dans les jeunes pousses du jazz connaissent ce collectif de dynamiteurs qui multiplie les performance scéniques et les apparitions dans des albums autoproduits. Nous aurions pu d'ailleurs parler plus rapidement de ce collectif si je ne les avais pas loupé à deux jours près cet été en Ardèche...
Le Grolektif est polymorphe, comme tous les collectifs, mais l'une des formations les plus représentatives est certainement Bigre! qui a livré un album qui m'avait échappé jusqu'à récemment. Il aura suffit de quelques mesures pour se rendre compte de cette erreur.
La simple évocation du mot "Bigre" laisse entrevoir, dans son atour suranné, d'une surenchère un peu cabotine. Les premières notes de la basse électrique de Raphael Vallade mettent alors dans le ton : Bigre est une sorte d'hybride entre la fanfare funk qui déambule dans les têtes et un Big Band traditionnel de 19 têtes dont quatorze vents qui s'égayent dans un groove de tungstène. Une véritable pièce montée jouissive où chacun des musiciens jouent avec les codes du Big-Band et de son organisation ultra codifiée pour livrer une musique directe et sans faiblesse, chargée d'entretenir un son urbain, iconoclaste et surtout diablement gauguenard.
Les morceaux se suivent avec la volonté commune de maintenir un groove gourmand et collectif. Chacun des musiciens oeuvre dans une forme d'échauffement rythmique où les cuivres (l'ensemble des morceaux sont composés et arrangés par le trompettiste Félicien Bouchot) sont roboratifs et tournés vers un son urbain où la guitare électrique de Nicolas Mondon prend des élans rock qui cadrent parfaitement avec la sonorité revendiquée...
S'il est difficile d'extraire un morceau en particulier dans cette construction linéaire et exaltante, on notera tout de même le travail remarquable de Dugelay au sax baryton qui reste l'un des piliers de cette formation, notamment pour sa prestation dans le meilleur morceau de l'album le très jouissif "be good bluesy Johnny".. Un disque de Grolektif disponible sur le site et visible en novembre à Paris... Et surtout une vraie joie de découverte !
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...