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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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21 février 2018

Le Fou fait 33 tours

Je n'ai pas particulièrement la nostalgie des vinyls, mais force est de constater que certaines musiques se plaisent sur ce format. Et pas seulement parce que c'est la mode. Quand on reçoit plein de disques, ce qui est mon heureux cas, on peut constater les effets d'habitude et les lames de fond : jusqu'en 2015, recevoir un vynil était un évènement. Samedi matin encore, le facteur m'a tiré du lit pour me remettre le huitième 33t de la pile.
Là n'est pas le sujet des deux disques paru sur le label Fou Records de Jean-Marc Foussat et qui s'avèrent être pensé comme des disques que l'on retourne et dont l'aspect sensuel du bras sur le sillon contribue au plaisir de la musique. Deux disques exigeants, on en attend pas moins de Foussat, où il est présent à des degrés différents. Deux disques qui se ressemblent dans leur volonté de questionner la perception et de se refuser à rentrer dans les cadres et les étiquettes.
Deux albums hors norme, qui méritent ainsi leur grande pochette.
C'est le cas bien sur de Département d'Education Psychique, un double album enregistré en live à Berlin en solo en 2016 et dans lequel l'électronicien livre son univers tout entier, fait de sons fiévreux, de phrases répétitives qui arrivent à être à la fois planantes et absolument inquiétantes, de voix dans les limbes qui prennent soudain toute la place et bruits soudains, à la fois familiers et totalement décalés, du bloblotement de l'eau en passant par le tintement lointain d'une cloche.
Ce n'est pas à proprement parler de l'électro, même si ce n'est prosaïquement que cela, c'est à la frontière de plein de choses, de la musique concrète, de l'expérience charnelle, du trip électronique... Il ne faut pas se poser de questions, c'est une vampirisation des sens, à proprement parler un cours d'éducation psychique où il faut vagabonder, s'abandonner, fermer les yeux pour mieux se laisser porter par les images, se laisser englober par une musique qui prend tout entier et qui doit même s'écouter au casque dans le noir, si l'on veut en profiter pleinement.
Mais rien ne vaut l'intensité de l'Homme Approximatif qui reprend le premier chant du recueil de Tristan Tzara. Rien d'étonnant à ce que le poète dadaïste soit célébré par Fou Records. Cela ne fait que souligner la grande proximité idéologique et esthétique entre nos musiques et ces mouvements artistiques du début du vingtième siècle, en même temps que l'essor du jazz.
Tiens Tiens.
Ici, Foussat n'est pas tout seul avec son Synthi AKS. Il y a les flûtes de Jamal Moss, qui trillent comme des oiseaux de passage et donnent un relief supplémentaire.
Et puis surtout il y a Jean-François Pauvros. 
Pas à la guitare, ça non, mais à la voix. Car Pauvros a une voix, grave, profonde, rocailleuse et pleine. Une voix qui hante, avec un léger souffle au fond qui récite le texte avec une neutralité calme et cependant doucement vibrante;
Le cocktail entre les machines et cette voix transporte absolument. Là aussi, le format 33t a son intérêt. Pour les plus anciens comme moi, qui ont connu les histoires racontées sur des livres-disques et les vieux disques de Chant du Monde, on y retrouvera comme une madeleine. Mais une madeleine au goût étrange, foncièrement psychotrope.
Les cloches sonnent sans raison et nous aussi...

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

64-Parking-St-Palais

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