Cloudmakers Five - Travelling Pulse
Revoici les marchands de rêves, et cette fois-ci, ils ont quitté les rivages de la Manche.
Depuis des années qu'on nous amuse avec le renouveau de la scène jazz anglaise, avec les jazzeux poseurs et électriques qui sont juste bon à alimenter les clichés de la pop-qui-joue-au-jazz, on en oublierait presque qu'il existe une scène digne de ce nom, largement tournée vers l'Europe (c'est vaste l'Atlantique, et il ne faut pas s'y noyer...).
C'est notamment le cas d'une certaine catégorie de musiciens qui se sont réunis autour de Whirlwind Records, le label du bassiste Michael Janish, que l'on entend ici, et qui fait d'ailleurs montre, dans un rôle de capitaine de route, d'un calme qui pourrait passer pour de la discrétion, s'il n'arrivait pas à contenir les bourrasques de son camarade batteur Dave Smith, particulièrement en vue dans "The Past is Another Country", long morceau introductif qui semble sonder les racines de Cloudmakers, l'orchestre du vibraphoniste Jim Hart : jazz-rock bien digéré et surtout pas resservi tiède, un certain regard progressif qui ne se perd pas en route et pas mal de choix harmonique qui témoignent d'une culture classique assez solide. On le retrouvera aussi dans le solo roboratif de "The Road", lâchant la meute d'un réjouissant quintet international.
Les Cloudmakers, tel que nous les avions entendu sur un live de l'AJMI étaient un trio et offraient pas mal d'énergie. Les voici devenu cinq, avec le multianchiste français Antonin-Tri Hoang et le guitariste allemand Hannes Riepler. Une bouffée de nouveauté qui ne change rien à la jeunesse et offre peut être même un peu plus de densité et d'incarnation à un orchestre qui sort ainsi de ses atmosphères nébuleuses pour toucher terre et trouver l'apesanteur
Pourquoi "Marchands de rêve" ? Les cloudmakers font des nuages, semble-t-il.... Et ces nuages étaient toujours pleins de pas mal de fumées alcalines, parfois opiacées, toujours psychotropes. Il n'était pas question de psychédélisme, mais d'onirisme. Il y avait un peu à l'écoute du disque comme une réaction chimique du bonhomme en collage
Ici avec ces deux lames supplémentaires, l'orchestre a beaucoup plus de ressources, et surtout le vibraphone de Jim Hart se libère de toutes les tâches dont il était lesté. Il laisse beaucoup de place à Hoang qui offre une vision plus heurtée. Pas forcément cauchemardesque, mais là aussi avec plus de relief. Hannes Riepler n'est pas en reste non plus dans la créativité et les possibilités offertes.
Les Cloudmakers ont trouvé la chimie pure pour produire de beaux nuages. Ce disque est un plaisir.
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...