France 2, le retour (Vichy revient, et il n'est pas content)
Je n’ai pas regardé « les infiltrés »
sur France 2, mais je n’ai pas besoin d’en savoir plus pour en faire
mon affaire : comme l’avait très bien analysé mon ami Eric, ce type de
journalisme, qui se généralise ne mérite pas son nom, ni même sa
fonction : celle de présenter une vision de la Société à travers un
angle, sans abuser ni tromper ses sources, et en étant le plus
impartial possible. Impartial ne veut pas dire neutre, car selon
l’angle abordé, le journaliste dira ce qu’il en pense, et selon sa
peinture des faits, le récepteur de l’information en retirera des
choses différentes.
Laissons la neutralité au factuel.
Bayonne a battu Biarritz 22-15, la bourse a perdu 9 pur sang, la Star
Academy a été remporté par un puceau, bref, ce genre de choses.
Je n’ai pas regardé « Les infiltrés »
sur France 2, mais je sais ce que j’en pense : la multiplication des
caméras cachées est une plaie du journalisme, démagogique et
manipulable à souhait qui donne au récepteur du message informatif
l’illusion du réel. L’illusion oui, car le montage existe quand même,
l’angle est là, mais le propos du journaliste se dissout dans celui
qu’il prétend être. Jeune couple à la recherche d’un logement ou
visiteur de prison ; peu importe.
Lorsque Daniel Mermet marche sur les
cadavres au Rwanda, dans une des plus déchirantes émissions de radio
qui me fut donné d’entendre, il marche en tant que journaliste, en
décrivant sa réalité de témoin journalistique. Quand Albert Londres
écrit sur le bagne de Cayenne, il le fait en tant que journaliste,
décrivant sa réalité de journaliste ; quand un détenteur de carte de
presse se fait passer pour un autre pour corrompre des sources, il mène
une enquête, mais ce n’est pas une enquête journalistique. C’est une
entreprise de dénonciation de faits par une utilisation biaisée d’un
montage d’image. Et même si le montage est honnête, même si les fait
sont avérés, cela restera biaisé, parce que « l’infiltré » aura trompé
ses sources.
Une autre question se pose, implacable : pourquoi ce reportage dans cet endroit ? quels ont été les critères de choix ? Raconter quelque chose ? Dénoncer quelque chose ? Faire du spectaculaire ? Qui a donné précisément cette adresse ? L'angle, c'était de dépeindre une situation in situ, ou de faire du spectaculaire ? De donner à voir ce qu'on s'attend à voir, ce qu'on vous a demandé ?
Je ne saurai répondre.
Je n’ai pas regardé.
Mais je sais ce qui s’est passé après : la dénonciation de l’objet de l’enquête, en loucedé, à la Ministre.
Lorsque le journalisme devient un
auxiliaire de Police, pour de vrai, il ne faut plus disserter sur le
devenir du journalisme, mais sur l’avenir de la Police. Lorsque le
journalisme devient un auxiliaire de Police, non plus pour réclamer le
gibet ou la potence comme on en a pris l’habitude mais pour faire les
enquêtes à la place des détenteurs de pouvoirs de Police avec une
écriture de journaliste, on est en droit de s’inquiéter sur la Liberté
de la Presse et sur la Démocratie.
Plus que d’habitude, je veux dire.
J'ai pas parlé de Bayonne tout à l'heure ? Bon, ben la photo a à voir, alors...