Culture, 2 minutes d'arrêt
Il y a un débat qui me parait assez symptomatique de la politique particulièrement bas du front que nous vivons. La nécessité ou non de garder un ministère la Culture.
Assez symptomatique, parce qu'on a bien compris où l'on plaçait la Culture, le Savoir, l'Enseignement et l'Art dans cette période trouble où la Princesse de Clèves est rabaissé au rang de pensum pour concours administratif et la musique un produit commercial qu'il est suspect de vouloir se partager... Mais ça va avec les considérations de l'exécutif (le lien est fabuleux !) qui se malaxent en harmonie avec les propos rancis des lecteurs du Figaro, leurs éructations contre la Culture vivante et tout ce qui n'a pas leur vue.
Dans ce registre, moi aussi je sais faire : pour ces gens, la Culture, c'est la conservation de la Pierre, la musique comme on l'a toujours fait, bien proprette et pas dissonante, faudrait pas les importuner pendant leur mort molle et lente, puisqu'ils la connaissent, la Culture, ils ont un disque de Johann Strauss Père -parce qu'ils aiment les concerts du Nouvel An- et une reproduction de clown triste de Bernard Buffet dans la cuisine. On comprend leur aigreur, ça doit pas être facile, l'ennui...
Je ne pense rien de bon du ministère de Culture, s'il consiste à laisser quelques baronnies de la DRAC décider de l'art officiel. Mais en revanche, la Création vivante a besoin de l'argent public, de la subvention et de la défense des expressions minoritaires, de la subvention des festivals, des projets, des lieux de spectacles et d'échange... Sans parti-pris et en s'appuyant sur les acteurs locaux.
Ça ne peut pas s'appuyer sur les seules collectivités locales, pour éviter les disparités territoriales, même si de fait, les Régions notamment ont pris une place importante dans le mécénat public. Pour ne parler que de musique, la volonté politique fait par exemple que les Pays de la Loire ont une scène vivace et exposée... Mais ce focus exclut de fait des régions tout aussi vivace, mais dont la politique culturelle est moins aventureuse, et dont les finances ne sont pas extensibles. L'état oui, semble-t-il. Pour l'Auto, la Bourse et les Banques en tout cas.
La réponse libérale qui consisterait à vouloir remplacer le mécénat public par le tout mécénat privé est erronée -naturellement-. La Crise économique tous les soirs à 20h ne fait que le prouver. Aujourd'hui, dans la musique improvisée, mis à part UBS et le Crédit Suisse, quelle grande entreprise finance des disques ? Cherchez pas hein !
Alors, oui, il faut un ministère de la Culture. Jack Lang n'a peut être fait qu'une seule belle chose dans sa vie, c'est d'avoir créé l'ONJ qui permit de mettre en lumière une scène. Il faut permettre une vraie politique culturelle ambitieuse. Une autre que celle d'Albanel dont le boulot semble aujourd'hui se limiter à essayer de mettre des barrages à l'Internet. On sait que ce gouvernement a un problème avec le Net, mais à ce point...
En tout cas, si l'on lit les commentaires du Figaro, Le ministère de la Culture ne doit servir qu'à entretenir les pierres immuables de la France Eternelle.
Je jette un œil par la fenêtre et je regarde la Cathédrale qui s'effrite.
Et je me dit qu'ils n'écoutent pas non plus leur électorat...