L'iditenté
Si certains, peut être de ceux qui n'avaient pas non plus goûté la classe souveraine de la Princesse de Clèves ou qui ne voyait que dans ces belliqueuses saillies amères que complexes d'infériorité, se posaient encore la question de l'attitude dominante quant aux Lettres, à l'Histoire et à la Culture, les derniers jours auront apporté une réponse franche.
Oui, c'est bien la pensée la plus bas-du-front et dangereuse qu'il soit possible d'observer, avec ses relents de censure, de propagande, de non-dits glaçants et de réécriture maurassienne de ce pays auquel nous assistons. Ne revenons pas sur l'épisode Berlinois qui m'aura valu une citation dans Libé -ce qui m'a fait rire- mais plutôt sur la déclaration absolument hallucinante du sémillant Eric Raoult concernant la toute récente prix Goncourt, Marie N'Diaye.
Soyons franc, ce n'est pas tant les propos d'un des provocateurs médiatique chargé de nous asséner des sophismes à la chaine qui me fait réagir, il est là pour chauffer le buzz et tenter de gagner la bataille des mots. Encore pourra-t-on le remercier d'avoir démontré que notre ministre en papier bible, si prompt à défendre la licence artistique et la liberté d'expression ne servait une fois de plus qu'à empoussiérer les étagères...
Non, ce qui me glace, c'est le ton acidulé et neutre du journal de France 2 qui parle de "polémique" et "d'opposition des intellectuels et de la gauche" comme s'il parlait de psoriasis.
Ce qui m'épouvante, c'est de lire les avanies de centaines de minables aigris dégueuler leur haine de ce qui est plus beau et plus intelligent qu'eux dans les commentaires de Libéro ou de Figation. Parce qu'au fond, comme les questions sur la "République Multiculturelle", la problème de ces ratés, c'est bien que Marie N'Diaye soit une femme, et une femme noire qui plus est. C'est ce qui est absolument insupportable pour ces primates d'une France qui moisit sur
pied, un peu comme le vin de la treille qu'on est censé aimé par dessus
tout parce qu'on est français du questionnaire... Soyons sur que Le Clézio aurait tenu les mêmes propos que ça n'aurait pas fait plus d'un entrefilet dans Le Magazine Littéraire...
Et si c'était ça, l'iditenté nationale, celle qui me fait parler anglais et me sentir gêné quand je croise un compatriote entrain de vitupérer ou de faire le coq à l'étranger. Celle qui me font penser que désormais, il n'y a guère plus que la langue que je partage avec la plupart de mes congénères bien que les belges la parlent bien mieux. Celle qui me fait dire que j'arrête désormais d'écrire sur ces choses qui me font grimper la tension et je m'en retourne aux saxophones... Parce que c'est toujours dans ces cas là que j'ai envie d'ailleurs.
Et une photo qui -justement- n'a strictement rien à voir.