Défaite de la Musique
Oui... Tous
les ans...
Encore une fois, alors qu'une poignée d'adolescents soiffards au sébum
inconstant viendront supplicier du sous-Téléphone sous mes persiennes, je
resterai enfermé dans ma bulle à écouter une musique qui me transporte
et qui aurait plus besoin qu'on aide à sa création, à sa pérennisation
et à la possibilité de la faire jouer en payant les artistes, plutôt que
de laisser les cafetiers faire leur beurre dans une foire aux décibels
qui tient plus de l'étalage de muscle commerçant que de la longue fête
de village dans la nuit chaude de l'été qui fut sans doute à l'origine
ce qui fut voulu par ses concepteurs.
Aujourd'hui, la défaite de la Musique, ce sont deux symboles : d'abord
la récupération
de Barbara par un ministre en papier-bible. Il parait que c'est la
ministre de l'Economie qui a eu cette idée de
distinction... La poésie n'a pas mérité cela ! Si le prix a été inventé,
c'est aussi parce que la "Fête de la Musique" est cette année dédiée
aux femmes. et pas du tout dans termes sexistes : "Les femmes sont une
source d’inspiration intarissable a qui l’on doit
les plus grandes mélodies. Muses, chanteuses ou musiciennes, Frédéric
Mitterrand a voulu leur rendre hommage, en plaçant la 29e édition de la
Fête de la Musique sous le thème de « la musique au féminin".
Sans commentaires...
Pauvre dame en noir qui aurait rejeté d'un œil papillonnant de mépris
toutes cette basse-cour caquetante et leurs piaillement à la chanson
française éternelle. Décidément, pour une certaine vision de la culture
calotine, le poète n'a droit de citer lorsqu'il améliore le quotidien des
lombrics. Pour la petite histoire, c'est la jeune Carmen
Maria Vega qui a gagné ; grand bien lui fasse, puisqu'il parait
qu'elle fait du jazz manouche selon le site du ministère.
On peut aussi en rire. D'autant plus que ce n'est pas si mal ce qu'elle fait, nonobstant que c'est autant du jazz manouche que Thomas Dutronc est de la musique de qualité..
L'autre symbole, c'est la nouvelle de l'arrêt de "A l'improviste" d'Anne
Montaron sur France Musique à la rentrée. Cette émission, unique en son
genre, permettait une vue panoramique sur les musiques improvisées
mondiales, et offrait chaque semaine des concerts sur un créneau
confidentiel, mais qui permettait le podcast. Cette mise à mort d'une
telle émission sur une radio de Service Public n'est pas seulement
insupportable ; elle est à l'image de cette culture paillette
insupportable qui sacrifie les marges au profit d'un consensus
crapoteux. Mais soyons sur que pour cela, nos pétitionnaires
de Médicis ne lèveront pas le petit doigt...
Sans doute parce que l'intérêt public et la diversité, la défense des
marges au delà des étiquettes ne franchit pas les lambris des salons, et
qu'elle ne cadre pas non plus avec les borborygmes de la défaite de la
musique...
Mais continuons à nous battre.