Camille
L'actuel engouement rouennais pour les impressionnistes ne cesse pas de m'étonner, surtout si l'on met dans la balance le battage qui a été fait avant que les festivités commence et la réalité assez molle de la ferveur de la population pour les croutes les magnifiques tableaux de cette si riche période. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que la seule vraie manifestation qui a fait parlé d'elle dans ce "festival de l'impressionnisme", c'est l'espèce de patronage digne des grandes heures de Dimanche Martin qui consistait à battre le record de la plus grand toile impressionniste sur le parvis de l'hôtel de Ville par des rouennais déguisés en canotiers sur l'air anachronique de "l'amant de Saint Jean"... On passera le fatras conceptuel de "l'imagerie" qui associe toujours "musette" et peinture chiante impressionniste : "L'amant de Saint Jean" a été créé en 1942 par Lucienne Delyle ; Monet bouffait déjà des Nymphéas par la racine depuis 16 ans et le "manifeste du Surréalisme" avait 14 ans... Mais les légendes sont tenaces !
Je ne suis pas encore allé voir l'expo aux Musée des Beaux-arts, mais sans nul doute elle me rappellera celle que je vis il y a presque 20 ans, lorsque le vénérable musée avait une rétrospective sur les cathédrales de Monet. Évidemment, Rouen est indissociable de Monet. Il a été le premier, peut être, à comprendre et à retranscrire graphiquement la lumière si particulière de certaines journées... Bon. Mais il n'y a eu que ça, culturellement à Rouen ?
Duchamp en rit encore. Les jeunes artistes qui créent et qui sont nombreux ici en pleurent toujours.
Ce qui est plus intéressant, c'est cette volonté d'introduire de l'art contemporain dans cette manifestation. La chose la plus visible, c'est Camille et ses vagues de bois, construit là, sur son pont par Arne Quinze et qui brille de mille feu dans le ciel bleu pétrole des fins de journées d'été. Camille qui réinterprète la lumière avec modernité, Camille qui est belle, tout simplement... Et surtout, Camille fait râler l'homo-automobilis qui ne se pose pas la question quand il s'agit d'éructer avec les bateaux dans le giratoire à barbeau, qui n'y voit qu'un paquet d'allumette... et ça, confessons-le, c'est déjà du bonheur !
Ce qui est sur; c'est que de toutes les tentatives de se réapproprier son fleuve, Rouen tient peut être là sa plus intéressante et brillante réussite. Pourvu que cela donne des idées pour la suite...