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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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20 décembre 2016

Sophie Agnel & Daunik Lazro - Marguerite d'Or Pâle

C'est une belle rencontre à laquelle nous convie Jean-Marc Foussat et Fou Records. Mais comment pouvait-il en être autrement, au regard des forces en présence ?
Marguerite D'or Pâle, enregistré à l'occasion d'un concert à Moscou relient deux improvisateurs qui aiment travailler le coeur du son avec patience et opiniâtreté. Deux musiciens qui ont su fouiller leur instrument pour en connaître chaque palpitation, chaque grain, chaque caresse.
Sophie Agnel n'est pas seulement cette formidable musicienne de l'ONJ d'Olivier Benoit, où elle apporte  cette palette sonore rare dans un tel orchestre. On évoquait son travail avec Olivier Benoit (toujours) sur REPS, mais que ce soit avec Catherine Wodrascka ou avec Phil Minton, elle a une relation au piano qui ne peut pas se limiter au clavier : elle frappe le bois ou pince les cordes, elle y dépose de nombreux objets bondissants ou assourdissants, mais sait aussi faire siffler les cordes comme des cymbales qu'on frotte tutoyant une stridence qui emplit l'espace et peut même s'installer dans une forme d'agressivité. 
Dans "Bbystro!", morceau assez court à l'image de l'ensemble du disque, la rapidité d'execution, tout comme la force de frappe en témoigne : ce n'est pas de la démonstration inutile ou un rapport violent. C'est un afflux sanguin, un souffle de vie.
On connaît Daunik Lazro pour ces nombreuses collaborations, et comme nous avons pu le voir, une ressortie avec Joëlle Léandre et George Lewis sur le même label cette année a été distingué dans l'habituel florilège de l'année ; Lazro sait jongler avec le chaos ou s'immiscer dans chaque souffle pour mieux le teinter de sa personnalité. C'est sans doute ainsi qu'il excelle, la plupart du temps au saxophone baryton mais ici parfois aussi au ténor, qu'il traite avec plus de pugnacité.
On a pu voir Lazro, avec Benjamin Duboc notamment, chercher l'épure. Sophie Agnel, en solo, est une habituée de cette démarche.
Travailler le son jusqu'à son essence. Cest ce que l'on retrouve ici à chaque extrémité de l'album. Grâce à la pianiste Sophie Agnel, sur "Avec Ki", le silence est à peine troublé par le tanin d'un souffle et le cliquetis incertain d'un piano altéré. Ils s'imprègnent presque inconsciemment d'une langueur slave, et d'un propos presque chambriste, à peine secoué par quelques grondements de saxophone. C'est une atmosphère que l'on retrouvera sur "Ochi Chornye", en toute fin d'album, qui confère à la prestation du duo une apparente douceur.
Elle n'est qu'illusion, puisqu'en un instant, tout peut se disloquer dans un chaos aussi puissant que sporadique.
Il en va de la musique du duo comme de leurs instruments ; derrière la patine et le vernis se cache de terribles tempêtes et des déflagrations de bois et de métal dont on ne sait pas toujours bien à qui ils appartiennent.
C'est le cas de "Cat's Shoe", où au cri du saxophone vient répondre la stridence des cordes. Le duo agit comme en écho, une manière de percer au plus profond du ressenti de l'auditeur, comme il le font au tréfond de leurs outils. Une forme de métonymie s'installe, troublante.
C'est le sillon dans lequel pousse les marguerite d'Or Pâle. L'alchimie des improvisateurs en liberté dans ce Moscou printanier qui évoque le dégel et le retour d'une flore vivante et exubérante.
De quoi rendre joyeux.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

44-Consolation

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