One Another Orchestra
One Another Orchestra, c'est l'orchestre nato par excellence.
Et si l'on joue sur les mots, l'excellence s'entend par tout ses signifiants.
Si l'on continue toujours à jouer sur les mots, ou sur le mot d'ailleurs, dans Another, il y a nato. Mais qui est Her ?
Her, c'est Catherine Delaunay, qui survole ce disque par son talent et sa douceur, par son entente avec François Corneloup au saxophone baryton et Tony Hymas au piano électrique, sans qui nato ne serait pas toujours nato. A peine entre-t-on dans ce "Voices of Nacfa Mountains", qui aurait pu être des Chants d'Itxassou auquel on pense souvent, on sait où l'on est, on retrouve ses repères libertaires et ses envies d'ailleurs, le propos est lyrique et puissant, le piano entraine avec la clarinette sur des tourneries africaines où danse la contrebasse d'Hélène Labarière.
Car le Her d'another, ce pourrait être elle aussi; la contrebassiste est fluide, chantante et combative, comme à l'accoutumée, en témoigne cette lecture magnifique du "Là, on est là" qui a empoigné nos ronds-points et nos manifs; La cohésion de groupe du sextet où le batteur Davu Seru a un rôle de gardien du temps parvient à transcender cet air simple et à lui donner de la profondeur et de l'espoir, ce qui n'est pas forcément l'air du temps.
La dynamique collective de One Another Orchestra est galvanisante, sans tomber dans la démonstration où le passage obligé, ça a toujours été la grande force de nato, elle est ici porté par les six musiciens comme une forme de chimie pure, et d'alchimie folle, qui brille dans ce morceau des faubourgs, mais aussi dans les bastions de résistance espagnols : la "Romance de la Gardia Civil Española" de Garcia Lorca trouve ses plus beaux atours interprétée par Billie Brelok, au delà du rap, donc.
Ce qui donne a One Another Orchestra cette couleur qui évoque immédiatement nato c'est, au delà de tout ce qu'on vient de dire, cette façon de tangenter et de rendre hommage à l'histoire du label, en évoquant Portal dans "La Cecilia" qui est sans doute le point culminant collectif de ce bel album, mais aussi en revenant sur les fées qui ont veillé sur le label, de Jacques Thollot ("Cinq Hops") à Sidney Bechet ("Waste no Tears").
On ne peut que tomber amoureux d'un tel album, qui voyage dans le temps dans les deux sens, à l'image du doc de Retour vers le Futur : à la fois sur un passé où nous sommes tant aimé et dans un futur sans fantasme où l'immédiateté domine et où ce qui compte avant tout, c'est le plaisir d'être ensemble.
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...