Effaré, comme un journaliste de PQR qui aurait découvert un angle
Il n’y a pas de bonne raison de lire la
presse quotidienne régionale. En général, c’est le journal qui traine
dans les bars, qu’on regarde d’un œil distrait pour avoir de la
contenance ou pour s’occuper les yeux. Des fois, on regarde
paresseusement les titres quand on sait attendre un article sur
quelqu’un qu’on connaît.
Bref, de l’ennui profond.
On pourrait évidemment faire une vraie
presse locale d’investigation, partir du local pour éclairer le
national, et même offrir une information libre de proximité ; las, il
n’est question dans nos faisandés journaux que d’accidents fortuits, de
larcins minables, de morts de la veille ou de retraités vertueux
aspirant à le devenir. C’est ce à quoi nous a habitué la PQR. On en
viendrait presque à dire que ça rassure. Ca donne des repères, un peu
comme les matinales de RTL : quand on sait ce qui est médiocre, ça aide
toujours à trouver le bon.
Aussi, lorsqu’on découvre, au milieu
d’un journal de province un article de critique des médias, un texte
qui se veut dénonciateur, c’est soudain un monde qui s’écroule. Comme
si rien n’était pareil, comme si dans une pliure d’espace temps, Emile
Zola avait couvert un tournoi de pétanque à Bains-les-Bains, Albert
Londres avait mangé tous les Curly au départ en retraite du lieutenant
Michetard à la caserne de Miramas. L’horreur.
L’insondable c’est pourtant produit
dans le Paris-Normandie de Lundi 2 février, sous la forme d’un article
présent sur le site de TV-Mag, héraut de la presse de qualité, et donc
potentiellement utilisé dans d’autres journaux du groupe de presse, ce
gage d’indépendance.
Dans ce pamphlet empourpré à l’eau
tiède, le journaliste s’en prend vertement au vénérable zapping de
Canal+, l’accusant de subjectivité et de parti-pris. Pris séparément,
dans les journaux qui causent à toutes occasions de « galère » et de
« prise en otage », subjectivité et partis pris sont comme un pull
jacquard sous une veste pied-de-poule.
On comprend alors cette petite fracture
qui s’instille dans la plume de celui qui découvre soudain la vertu de
l’éditorial. Celui de ne pas japper avec les chiens de garde, celui de
ne pas se concentrer sur le factuel, l’évènementiel et la nomenclature
des idées toutes faites au gré de ce que l’opinion est censé opiner.
Non, le zapping n’est pas objectif.
Aucun montage ne l’est. C’est même le propre même du montage, en image
ou en son, l’angle se fait par le montage. Le zapping est un éditorial,
et l’éditorial est avant tout du journalisme. De celui qui ne fait pas
que vendre des cabas de poireaux. Et oui, les monteurs sont des
journalistes. D’une autre race, certes que ceux qui remâchent leur
évidences dans des publications qui servent à décorer les tables de PMU.
Et une image qui n'a strictement rien à voir.