Relié pleine-peau
Il est de bon ton de se goberger sur la nomination d'un vrai lettré au ministère de la Culture, ce qui, il est vrai n'était pas arrivé depuis Jacques Toubon longtemps.
Mais la question est de savoir si ça changera quelque chose. On sait le bonhomme fan d'Ozu et de Visconti, connaisseur d'un jazz de facture classique, féru d'art contemporain, de littérature classique...
Sur le fond, cela n'en prend pas le chemin ; je doute qu'il y ai quoi que ce soit de remis en cause sur La lettre, qui explique en partie le marasme culturel et, disons le mot, la haine du fait culturel tel qu'on peut le voir depuis longtemps dans les milieux qui trouvent du charme au pouvoir.
Les questions centrales resteront le droit d'auteur, le financement des projets culturels visant à la cohésion sociale et la transformation de la société et le régime des intermittents.
Au mieux, n'attendons rien. Le nouveau ministre ne changera sans doute rien à la politique hadopiste et les artistes qui essayent de griser les villes bistres d'ennui se feront toujours traiter de pouilleux sur les forums de la pensée en boîte de Libéro et Figation...
En fait, ce ministre, je le vois un peu comme un livre en papier bible, relié
pleine-peau, casé dans une bibliothèque ouvragée en bois précieux des colonies de la République, elle-même installée dans un bureau ministériel : c'est décoratif, personne
ne l'ouvrira jamais, ça créé de la distance avec le visiteur, ça jaunit
de poussière et ça impressionne le cuistre.
C'est une conseillère qui décrit le mieux la situation de la culture en France, finalement peut-être malgré elle dans cette interview. "[Le Président] est là, comme il est ailleurs : quand il lit Maupassant, il lit tout Maupassant" (a-t-il souffert sur Bel-ami ?). La Culture en France en est là. On lit "tout Maupassant" et on subventionne moins les festivals.
Et ce n'est pas un beau livre, a fortiori "L'intermède Romain" de Drieu La Rochelle qui y changera quelque chose.
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...