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Sun Ship
Franpi, photographe et chroniqueur musical de Rouen, aime la photo, les concerts, les photos de concerts, la bière, les photos de bière, le Nord, les photos du nord, Frank Zappa et les photos de Frank Zappa, ah, non, il est mort.
Prescripteur tyrannique et de mauvaise foi, chroniqueur musical des confins.
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17 mai 2012

Benoit Delbecq - Crescendo in Duke

La grande force du Label Nato, c'est sa diversité. Cette façon de faire exactement le disque désiré au moment adéquat, sans se préoccuper d'une continuité dans le style.
C'est sans doute ce qui fait sa couleur et sa cohérence générale, pouvoir passer du Hip-Hop de Ill Chemistry au trio improvisé de Tony Hymas et les frères Bates sans qu'on n'y trouve de faute de goût. C'est cette façon de prendre la musique à bras le corps sans se préoccuper des étiquettes, juste des fidélités et du plaisir de la musique. C'est dans ce contexte que parait Crescendo in Duke, le nouvel album du pianiste Benoit Delbecq, l'homme de Kartet et des expériences formidables comme le magnifique Circles & Calligrams, le pianiste proche du M-Base qui ne cesse de nous étonner...
Un album comme les aime Jean Rochard, le producteur de nato : à Cheval entre l'hexagone et Minneapolis, la ville de Prince qui regorge de tant de musiciens remarquables, comme un vivier intarissable. Un album hommage qui ne fait pas dans le plan-plan ou le mouchoir-à-l'oeil, mais qui investigue et modernise, qui interprète et souligne. C'est sa grande réussite, illustré magnifiquement par les dessins de pochette, autre marque habituelle du label.
Rendre hommage au Duke est certainement l'un des exercice les plus casse-gueule qui soit. Que créer sur Ellington qu'il n'a lui même joué ? Que dire de nouveau sur le talent ourlé d'un compositeur qui restera forcément dans l'histoire globale de la Musique pour la simple raison qu'il y est déjà ? C'était toute la gageure de Delbecq ; comme Airs de Jeux le fit en son temps chez nato avec Satie, Crescendo in Duke réussit parfaitement (on peut l'écouter sur Spotify), en choisissant de lieux d'enregistrement, deux orchestres, deux atmosphères qui se complète : Meudon avec un sextet d'improvisateurs remarquables et Minneapolis avec une muraille d'efficacité et de groove...
Il n'y a pour s'en convaincre qu'à écouter "Portrait Of Wellman Braud", enregistré à Minneapolis avec des habitués de Prince : les soufflants pleins de Funk de The Hornheads et l'un de ses batteurs, Michael Bland. Ce morceau issu de la New Orleans Suite est plein de surprises et de recoins, de trouvailles et de dentelles sans qu'on y perde en puissance et en vigueur. Delbecq n'y fait aucune concession, les altérations de son piano préparé s'harmonisent parfaitement avec le groove omniprésent de ses comparses... Bland est un batteur habitué de nato, puisqu'il participait au disque Minneapolis de Portal ; sa complicité avec le formidable bassiste Yohannes Tona et la synergie du trio y fait merveille.
Le ton de Meudon est plus élastique, rend moins hommage au mouvement de la musique d'Ellington qu'à son absolu rafinnement, et aussi à sa grande modernité. Delbecq s'y est entouré de musiciens fantastiques comme Tony Malaby ou Tony Coe, mais aussi des comparses de longue date en trio, le havrais -et trop rare- Jean-Jacques Avenel et le batteur et électronicien allemand anglais (du Sussex) Steve Argüelles, ancien du trio Ivoire de Hans Lüdemann. Il faut entendre -entre autre- "Goutelas Suite" et son introduction de "Fanfare" cabossée et la clarinette de Coe sur "Goutelas" qui est le sommet de l'album. on y découvre également un formidable Antonin Tri-Hoang à la clarinette basse ; le jeune soliste de l'ONJ est vraiment l'un des musiciens les plus intéressant du moment. On le découvrira également sur "Diminuendo & Crescendo in Blue", l'un des rares morceaux ultra-connu d'Ellington choisi par Delbecq, qui a fait le choix de ne pas tomber dans l'écueil du morceau connu de tous, ce qui lui donne plus de Liberté.
Ce qui est intéressant, avec de tels musiciens, c'est que dans l'approche très libre de la musique universelle d'Ellington, on retrouve, notamment dans "Whirpool" des rhizomes de la Nouvelle-Orléans, du jazz des origines qui semble renaître de ce terreau nouveau. C'est aussi ça qui fait de Crescendo in Duke un album majeur qui consacre deux pianistes : Delbecq et celui à qui est rendu hommage, et de quel manière dans le "Fontainebleau Forest" final, en piano solo...
indispensable.

Et une photo qui n'a strictement rien à voir...

08-Garance

Commentaires
F
Diantre... Le tréma sur le U de Argüelles et son passé avec Lüdemann (autre Tréma) m'aura mis dans l'erreur quant à sa nationalité :)<br /> <br /> Ah... Oui, Spotify ! Long débat. Je cherchai à réécouter Circles & Calligrams, et j'ai été surpris d'y trouver quelques nato... D'un autre côté, c'est fort pratique, surtout pour renvoyer à des écoutes sur les blogs et pour avoir à dispo des milliers de titres qui permettent de s'y retrouver dans sa culture musicale. Mais rien ne remplace l'objet, hein :)
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J
... et une fois de plus, la photo a tout à voir
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J
Sun ship est un morceau de Coltrane que j'affectionne particulièrement, qui m'a longtemps habité. Aussi figurer sur ce site grâce au talent de gens comme Benoît Delbecq, Tony Hymas ou Ill Chemistry est plein de sens et d'encouragements (en ces temps difficiles comme disaient Brecht et Léo Ferré - nous devrions au moins les rendre drôlement difficiles).<br /> <br /> <br /> <br /> Petit post commentarium : Steve Argüelles est british indeed (du Sussex)<br /> <br /> Second post commentarium : Spotify, Spotify ! Vous avez dit Spotify ?
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