Pourtant...
Je n'ai jamais eu une passion débordante pour Ferrat, mais je suis né avec. S'il est question des figures tutélaires de la chanson française, et si l'on met de côté les cas Gainsbourg, Higelin et Nougaro, sanctifiés pour d'autres raisons que je n'ai -à mon avis- pas besoin d'expliquer, j'ai toujours préféré Brassens et Ferré à Ferrat pour deux raisons simples, liées à l'écriture plus fluide et plus puissante des premiers, et surtout aux arrangements et à la composition, que j'ai toujours trouvé lourde chez l'ardéchois. Mais la sympathie pour l'homme, comme le lourd atavisme familial et amical aidant, je suis un peu triste, ce soir.
C'est l'Ardèche que j'aime chez Ferrat. Son petit bout de montagne qui m'est devenu un bout de soleil depuis dix ans. L'Ardèche et plusieurs combats qui en ont fait un homme debout, même si je ne partageais pas tout...
Si j'ai été content de voir aux informations télévisées quelques images survolées d'une région que j'ai appris à aimer, je reste assez étonné de l'espèce de mausolée médiatique auquel il aura eu le droit. Des dizaines de minutes de déploration nationale pour un poète dont aucune antenne n'avait cure depuis belle lurette et dont ils parleront en évacuant tout de même Aragon (quelle performance !). Cela a permis de voir avec quelle morgue on twistait ses mots, pour en faire une confondante neutralité poétique où le cortège habituel des pleureuses médiatiques s'épanche, oubliant que s'il a chanté "Aimer à en perdre la raison" ou "La Montagne", il avait aussi -surtout- "Potemkine" ou "En groupe, en Ligue, En procession"...
Alors ce soir, en mémoire, une photo qui sans doute aura tout à voir !