Cathala / Durand / Vaillant - Live au Sunset
Habitué à le voir jouer en trio avec le batteur Christophe Lavergne et la contrebassiste Sarah Murcia, ou au sein de son orchestre Print, c'est à la fois avec plaisir et curiosité que l'on attendait le saxophoniste Sylvain Cathala au sein d'un nouveau trio, en compagnie cette fois du guitariste Pierre Durand et du batteur Frank Vaillant.
Un disque enregistre Live dans la salle parisienne du Sunset où le trio avait abordé l'année dernière un programme composé de morceaux originaux et de compositions anciennes, notamment "La nuit des Bulgares" qui ouvre l'album et que l'on retrouvait déjà sur l'album Spirea du Benzine de Frank Vaillant.
Il n'y a guère de surprise à retrouver ces trois musiciens ensembles. Ils ont des univers assez proches et nerveux. Tous les trois savent mêler une approche instinctive et chaleureuse tout en ne négligeant pas un propos maturé où le goût pour les images est assez sensible.
On sait Cathala attiré par les ambiances nocturnes et interlopes dans sa musique. On retrouve une nuit brûlante dans un morceau comme "Bloody". Il s'échauffe sur la construction rugueuse de ses deux comparses faite de polyrythmie et d'électricité lui permet de l'exprimer de manière plus dure qu'avec son trio habituel.
Notamment repéré pour son magnifique disque où la Nouvelle Orléans avait un rôle central, Durand apporte à l'univers de Cathala une fragrance de blues, notamment dans sa composition "White Dogs" au pivot de l'album. Elle donne un côté très tranchant au dialogue entre le ténor et la guitare. Cette rencontre en live tient du face-à-face. Cathala et Durand s'entrechoquent et se nourrissent mutuellememnt d'une énergie communicative. Ce morceau tutoie le rock sans pour autant s'en contenter : certes, la batterie de Vaillant attise les braises au milieu des saturations de la guitare, mais l'ostinato de Cathala confère à ce morceau une dimension pénétrante de cycle infini sur lequel ses comparses peuvent se permettre tous les excès.
Amateur des conceptions géométriques dans sa musique (on peut d'ailleurs le constater sur la pochette), Cathala trouve avec ses deux comparses l'occasion d'explorer au plus profond tous les angles particuliers du triangle, notamment grâce au jeu très versatile de Vaillant, même si on le découvre ici plus émacié qu'à son habitude. Tout au long de l'album, la distribution des rôles apparaît très mouvante dans ce trio sans basse ou le rapport de force est nécessairement très égalitaire.
Le trio peut être très aigu et anguleux ou au contraire avancer de front sur des morceaux plus apaisé.
Ainsi, dans "To Begin", on découvre même une musique très abstraite où le ténor vient érafler le son monochrome de la guitare. De cette atmosphère de limbes émerge la batterie au début de "Black Uranus" qui lui fait suite et la montée en tension se fait crescendo, jusqu'à ce "Endymion", également composé par Syvain Cathala, et qui clôt le propos dans une explosion d'énergie. Cette petite suite s'affiche comme un triangle au sein même du triangle.
Un mouvement mécanique au mécanisme bien huilée qui offre une grande liberté à un trio qui trouve sa meilleure expression sur scène. Une belle captation de cette très intéressante rencontre.
Et une photo qui n'a strictement rien à voir...